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Comment l’éthique peut guider la recherche

           Søren Holm et John Harris reprochent au principe de précaution de brider la recherche (Nature vol.400 p.398, 1999). Cette opinion me paraît procéder d’un contre-sens sur la nature du lien entre science et progrès.

           Une découverte n’est par définition jamais évidente: quand un problème surgit, les méthodes de résolution ’clés en mains’ ont toutes les chances d’être les moins productrices de nouveauté. C’est là au contraire qu’interviennent les valeurs morales, dans la science comme dans la vie en général. Le vrai progrès est celui qui prend source dans le refus de transgresser ses valeurs dans une situation difficile: c’est alors qu’apparaissent d’autres possibilités, non perçues auparavant, et qui mènent aux découvertes, suivant ce qui est à mon avis l’essence même de la science en tant que fille de l’éthique. C’est précisément le problème moral surgi à la conscience du chercheur, qui l’alerte sur le fait qu’il est capable de trouver mieux. Ne pas écouter la voix de sa conscience dans une telle circonstance conduit ainsi à passer à côté d’une découverte. C’est donc, bien au contraire, précisément dans la recherche que les préoccupations éthiques manifestent le plus clairement leur utilité.

           Ainsi, le principe de précaution doit-il être considéré comme un guide pour éviter des directions immatures, permettant d’en dégager de plus appropriées.

            Joël Sternheimer
            Réseau Associatif de Chercheurs Indépendants
            (1 rue Descartes 75005 Paris)
            paru dans Nature vol.402 p.576 (9 décembre 1999).

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